Le métier du client numérique

La généralisation des procédures numériques transforme fondamentalement la relation client-fournisseur.
Le client qui initialisait librement l’échange, devient un acteur d’une procédure, unilatéralement définie et maîtrisée par le fournisseur.
Pour satisfaire ses besoins, le client est amené à acquérir et à entretenir de nouvelles compétences.

Quelques définitions

Métier

Le métier du client numérique 1Un métier désigne l’exercice d’une activité humaine :

  • travail déterminé dont on peut tirer des moyens d’existence ;
  • occupation permanente.

Par extension, “le métier” désigne la corporation qui réunit tous ceux qui exercent la même activité professionnelle.

Client

Le client est une personne (physique ou morale) qui exprime un besoin qu’il ne peut satisfaire lui-même.

Fournisseur

Le fournisseur est une personne (physique ou morale) capable de satisfaire le besoin d’un client, en lui apportant une solution, composée de produits et/ou de services.

Relation client-fournisseur

Le métier du client numérique 2Pour satisfaire les deux parties, la relation client fournisseur repose sur la clarté d’un contrat (formel ou informel).
Chacun apporte sa contribution pour obtenir le meilleur résultat :
le client doit exprimer complètement son besoin : fonctionnalités, délai, coût ;
le fournisseur doit livrer une solution conforme à la demande.

L’incidence du numérique sur la relation client-fournisseur

Les entreprises (fournisseurs de produits et de services) ont, très vite, évalué les gains de productivité, donc de compétitivité, offerts par l’usage des techniques numériques dans leurs relations commerciales.
Désormais, en exploitant les ressources numériques, les entreprises stimulent les besoins des consommateurs et pilotent les procédures de l’échange.

Le passé : une relation humaine équilibrée

Dans un passé, encore récent (il y a une trentaine d’années) :

Le métier du client numérique 3le client formulait son besoin, via l’interface humaine du fournisseur ;

le fournisseur proposait une solution et indiquait les conditions de l’échange : coût, fourniture, facturation ;

le client discutait, d’égal à égal, l’offre du fournisseur et pouvait en négocier certaines conditions avant de passer contrat ;

le fournisseur livrait la solution au client, le client vérifiait la conformité de la fourniture avant de régler la facture ;

Le client avait la prérogative de l’échange ; il s’impliquait dans la procédure d’exécution dont il vérifiait le bon déroulement.

La période transitoire : l’adaptation

Au cours des dernières décennies, le client a découvert de nouvelles interfaces, auxquelles il s’est docilement adapté.

  • Le client a effectué ses retraits bancaires au DAB (distributeur automatique de billets) ;
  • Le client s’est astreint au dialogue imposé par les serveurs vocaux des entreprises ;
  • Le client a visité les sites de ses fournisseurs pour y découvrir les offres ;
  • Le client a passé des commandes numériques ;
  • Le client a reçu des documents administratifs numérisés ;
  • Les services administratifs l’ont amené à privilégier la numérisation des transactions avant de les rendre obligatoires.

En parallèle, le client s’est formé à l’usage des nouvelles technologies numériques.
Il a découvert l’ordinateur personnel qui s’est réduit en volume et qui s’est enrichi en fonctionnalités. Il s’est doté de tablettes et de smartphones. Il s’est formé à l’usage des dialogues numériques avec des robots.
Les clients, les plus réticents aux mutations technologiques, ont vite admis qu’une liaison numérique était devenue une obligation sociale, sans laquelle il n’est plus possible de survivre. Ceux qui avaient échappé au téléphone, à la télévision, à l’automobile, aux voyages aériens… ont été submergés par la vague numérique.

Le présent : une relation numérisée dissymétrique

Le fournisseur dispose des produits et des services indispensables à la satisfaction des besoins des clients. De plus, désormais, il définit les modalités du cycle de l’échange auquel le client doit s’adapter.

La prospection

Le fournisseur propose, à ses clients, un catalogue de ses offres de produits et de services sous une forme attrayante.
Cependant, extraire l’objet convoité de ce catalogue s’avère souvent être un exercice fastidieux.

Le métier du client numérique 4Pour pouvoir consulter le site du fournisseur, le client est contraint d’accepter, en bloc, une liste de conditions générales (RGPD oblige).

Le fournisseur propose, en priorité, les offres standardisées qui sont les plus intéressantes de son point de vue : marge, disponibilité, fidélisation.

Cette approche ne correspond pas à l’intérêt du client qui cherche une solution spécifique pour résoudre un besoin particulier. Aucun interlocuteur humain n’est accessible pour ajuster l’offre par rapport au besoin. Les FAQ (foires aux questions) ne traitent que des problèmes déjà résolus, sans prendre en compte les questions trop spécifiques.

Lors d’une simple visite du site, le fournisseur enregistre soigneusement certaines données préférentielles qui ne manqueront pas d’être utilisées dans les futures recherche d’un client identifié.

La commande

Son choix effectué, il appartient au client de saisir le bon de commande, conçu par son fournisseur.
Le client est contraint de suivre scrupuleusement la procédure imposée en remplissant consciencieusement toutes les cases et en dévoilant au passage de nouvelles données personnelles… dont on se demande bien à quoi elles peuvent servir dans la présente commande.

La livraison

Le fournisseur optimise les tournées de ses sous-traitants et il appartient au client de s’organiser pour recueillir la livraison à l’heure fixée par le fournisseur, en mettant, éventuellement, ses proches à contribution.

Le règlement

Dans l’échange numérique, le règlement précède la livraison.

Le client se plie au mode de règlement choisi par le fournisseur, en exposant ses données bancaires et en s’astreignant à jouer avec ses mots de passe et avec les codes confidentiels transmis sur son téléphone.

L’après-vente

Le métier du client numérique 5

Affaire conclue, le fournisseur soumet au client un questionnaire de satisfaction qui ignore toute question relative à l’ergonomie de la procédure, telle qu’elle serait perçue par le client.

Le client a toujours la possibilité d’exprimer un commentaire libre en complément des réponses à des questions fermées. Simple soulagement, car ces commentaires n’entrent pas dans les grilles de dépouillement et ne sont jamais pris en compte.

Le métier de client

Le numérique renforce la primauté du fournisseur sur ses clients captifs.

Les nouvelles compétences

Le client est donc tenu d’apprendre et d’exercer un nouveau métier.

Le métier du client numérique 6Le client doit apprendre et appliquer les procédures définies par le fournisseur.
Le client doit assimiler le vocabulaire utilisé par le fournisseur, de plus en plus souvent en anglo-américain.
Le client doit exécuter rigoureusement les modes opératoires imposés, sous peine de ne pas avoir accès au produit ou au service souhaité.
Le client fournit gracieusement les données personnelles exigées par la procédure du fournisseur.
Le client qui accepte implicitement les conditions générales, se prive de tout recours en cas de différend.
Le métier de client exige une grande virtuosité mentale pour s’adapter à l’ergonomie spécifique du site de chaque fournisseur.

Le métier de client exige une formation permanente continue, dans un environnement en perpétuelle évolution technologique.

La création d’emplois

Le métier du client numérique 7Qui a dit que l’usage des outils numériques allait détruire des emplois ?

Bien au contraire, ces procédures numérisées créent, chez les clients, des millions d’emplois chronophages.
Mais – particularité non négligeable – ces emplois sont entièrement bénévoles.

Lien interne : bonheurs et malheurs du client

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