IA et administration publique, tout le mal et le bien que l’on peut en dire

L’IA en tant que traitement de l’information permettant « aux machines » d’apprendre et de se développer en utilisant des algorithmes devrait naturellement trouver sa place dans les dispositifs de l’administration publique.
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Du gouvernement chinois qui met sous tutelle et contrôle sa population à l’Estonie qui se veut un modèle exemplaire de gouvernance numérique, toutes les facettes, les envers et les endroits sont sous nos yeux tantôt mirobolants, tantôt effrayants. L’IA peut être tout aussi bien une aide à plus d’efficacité dans les administrations publiques, automatisant les processus répétitifs et chronophages, améliorant la prise de décision en temps réel, vérifiant les conformités, libérant du temps et réduisant les coûts. Mais, elle autorise aussi la surveillance et le contrôle social par la reconnaissance faciale, la surveillance de masse des minorités ethniques, des manifestants et des dissidents politiques.

La mise en pratique du numérique dans les politiques publiques, un rebond ?

L’amélioration des processus de décisions et l’automatisation de certaines tâches sont des avancées que l’on ne peut nier. Les systèmes existants sont en mesure, par entrainement, de reconnaître des modèles et par là même de prédire des résultats. Ce sont des atouts non négligeables pour les décideurs afin d’appréhender les impacts de leurs décisions et d’éclairer leurs choix.

Mais, c’est aussi une possibilité offerte aux citoyens d’accéder à des services plus efficaces et plus proches de leurs besoins. La généralisation des « chatbots » (système automatique conversationnel) offre aux administrés une possibilité d’accéder à l’information administrative 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24. Les temps d’attentes anciens… et les fenêtres d’ouverture des guichets sont renvoyés à un passé lointain et inefficace. Mais en même temps leur généralisation éloigne toute une population âgée mal à l’aise, voire inapte à l’usage de ces nouveaux outils.

L’analyse des besoins et les solutions préconisées sont ainsi approfondis, les administrations publiques sont en mesure en mieux planifier leurs ressources et leurs services.

La transparence des processus est renforcée

Cette mesure n’est pas sans impact sur la vie des citoyens, la question de la confidentialité des données est posée. Il faut impérativement une mise en place de la transparence des processus afin de garder le cap sur une éthique de la décision… La prudence doit être de mise dans ces choix. L’IA n’est pas la panacée, les décideurs et acteurs de la vie publique doivent impérativement garder la main sur ces processus. In fine, ce sont eux qui prennent les décisions, éclairées ou pas par une exploration d’une IA.

Quels sont les risques ?

Ils sont multiples et de tous ordres. Il vaut mieux les avoir clairement à l’esprit avant d’entreprendre toute politique d’usage de l’IA :

  • Étant donné son mode fonctionnement, une IA peut être tentée de reproduire les préjugés et biais existants dans les données consultées, ce qui aboutira à une discrimination intolérable, dans les domaines de la justice, du logement, de l’emploi, etc.
  • L’IA est toujours compliquée à interpréter et analyser. Ses algorithmes sont potentiellement compliqués. Cela peut nuire à la transparence et conduire à ce que les citoyens perdent confiance dans les institutions publiques.
  • Sa généralisation rend sensible les administrations à la technologie en cas de pannes techniques ou de défaillance.
  • La vie privée et la sécurité des données sont de ce fait très exposées.
  • Accessoirement, cela peut occasionner progressivement la suppression et la perte d’emplois.

La prise en considération de ces risques est essentielle pour leur meilleure maitrise des risques. La diversification des sources de données peut permettre une vue plus juste, plus pondérée et éviter de ce fait les biais. La formation des employés est indispensable pour une bonne compréhension et maitrise de l’utilisation de l’IA.

Concrètement, que fait le gouvernement français ?

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Pour ou contre

La France a également pris des initiatives pour promouvoir l’utilisation de l’IA dans son administration publique. Voici quelques exemples :

  1. France IA : En 2017, le gouvernement français a lancé le programme France IA pour stimuler l’innovation dans le domaine de l’IA et promouvoir son adoption dans les secteurs public et privé. Le programme France IA comprend plusieurs mesures, notamment un soutien financier pour les projets d’IA et la création d’un réseau d’incubateurs pour les start-up spécialisées dans l’IA.
  2. Stratégie nationale pour l’IA : En 2018, le gouvernement français a publié sa stratégie nationale pour l’IA, qui vise à faire de la France un leader européen de l’IA. La stratégie comprend des initiatives visant à renforcer la recherche en IA, à développer l’expertise en IA, à soutenir les start-up et à promouvoir l’adoption de l’IA dans l’administration publique.
  3. Plan d’action pour un État au service d’une société de confiance : en 2018, le gouvernement français a également lancé un plan d’action pour un État au service d’une société de confiance, qui vise à moderniser l’administration publique et à améliorer les services publics grâce à la technologie. Le plan d’action comprend des initiatives visant à utiliser l’IA pour automatiser les tâches administratives et à améliorer les services publics en ligne.
  4. Expérimentations d’IA dans l’administration publique : plusieurs ministères français ont lancé des expérimentations d’IA pour améliorer l’efficacité de l’administration publique. Par exemple, le ministère de l’Intérieur utilise l’IA pour analyser les données de sécurité publique et prévoir les risques de criminalité, tandis que le ministère de l’Économie et des Finances utilise l’IA pour détecter les fraudes fiscales.

En somme, la France a pris des mesures pour promouvoir l’utilisation de l’IA dans son administration publique, notamment en soutenant la recherche et l’innovation en IA, en développant l’expertise en IA, en soutenant les start-up et en expérimentant l’IA dans les ministères.

Les pays en pointe pour l’utilisation de l’IA dans leur administration publique

  1. Singapour : Singapour est considéré comme l’un des pays les plus avancés en matière d’utilisation de l’IA dans l’administration publique. Le gouvernement singapourien a lancé plusieurs initiatives pour stimuler l’innovation dans le domaine de l’IA, notamment le programme AI for Everyone qui vise à sensibiliser le public à l’IA et à promouvoir son adoption.
  2. États-Unis : Les États-Unis ont également une forte présence dans l’utilisation de l’IA dans l’administration publique. Le gouvernement américain a lancé plusieurs initiatives pour promouvoir l’adoption de l’IA, dont le programme AI.gov qui vise à coordonner les initiatives d’IA au sein du gouvernement fédéral.
  3. Chine : La Chine est un leader mondial dans le développement de l’IA et son gouvernement a pareillement investi massivement dans l’utilisation de l’IA dans l’administration publique. Le pays a lancé plusieurs projets pilotes d’IA dans des villes intelligentes pour améliorer les services publics.
  4. Royaume-Uni : Le Royaume-Uni a lancé un plan d’action sur l’IA en 2018, qui vise à promouvoir l’adoption de l’IA dans l’administration publique. Le gouvernement britannique a ainsi créé une unité d’IA dédiée pour aider à coordonner les initiatives d’IA au sein du gouvernement.
  5. Estonie : L’Estonie est un petit pays qui est souvent cité comme un exemple de l’utilisation efficace de la technologie dans l’administration publique. Le pays a développé une plateforme d’e-gouvernement qui utilise l’IA pour améliorer l’efficacité des services publics et simplifier les processus administratifs pour les citoyens.

Il est important de noter que de nombreux autres pays ont également commencé à adopter l’IA dans leur administration publique et que cette liste ne représente qu’une sélection de pays en pointe dans ce domaine.

Fonds documentaire
Union européenne décisions

Quelles initiatives a prises l’Union européenne dans le domaine de l’utilisation de l’IA pour son administration publique ?

L’Union européenne (UE) a de même pris des initiatives pour promouvoir l’utilisation de l’IA dans son administration publique. Voici quelques exemples :

  1. Stratégie pour une IA de confiance : en 2018, la Commission européenne a publié sa stratégie pour une IA de confiance, qui vise à promouvoir l’utilisation responsable et éthique de l’IA dans l’UE. La stratégie comprend plusieurs initiatives pour encourager l’adoption de l’IA dans l’administration publique, notamment la création d’un réseau européen de centres d’excellence en IA pour aider les administrations publiques à développer leur expertise en IA.
  2. Initiative européenne pour l’IA : En 2018, la Commission européenne a également lancé l’initiative européenne pour l’IA, qui vise à coordonner les initiatives d’IA au niveau européen et à soutenir la recherche et l’innovation en IA. L’initiative comprend plusieurs mesures pour promouvoir l’adoption de l’IA dans les secteurs public et privé.
  3. Investissements dans la recherche en IA : L’UE investit également dans la recherche en IA pour soutenir l’innovation et le développement de technologies d’IA avancées. Par exemple, le programme Horizon 2020 de l’UE finance des projets de recherche en IA pour stimuler l’innovation dans ce domaine.
  4. Réglementation de l’IA : L’UE travaille actuellement sur une réglementation de l’IA pour promouvoir son adoption responsable et éthique. La réglementation proposée comprend des mesures pour garantir la sécurité et la confidentialité des données, pour prévenir la discrimination et pour garantir la transparence et la responsabilité dans l’utilisation de l’IA.

En somme, l’UE a pris des mesures pour encourager l’adoption responsable et éthique de l’IA dans son administration publique, notamment en coordonnant les initiatives d’IA au niveau européen, en soutenant la recherche et l’innovation en IA, et en travaillant sur une réglementation de l’IA.

En conclusion, une IA peut-elle gouverner un pays ?

IA et administration publique, tout le mal et le bien que l’on peut en dire 3À l’heure actuelle, une intelligence artificielle (IA) n’est pas capable de gouverner un pays de manière autonome. Les IA ne sont que des machines programmées pour exécuter des tâches spécifiques en suivant des algorithmes préétablis et ne disposent pas d’une intelligence générale, c’est-à-dire de la capacité à comprendre et à apprendre de manière autonome comme le font les êtres humains.

Le gouvernement d’un pays implique la prise de décisions complexes qui nécessitent une compréhension de la société, de l’économie, de la politique et de nombreux autres facteurs. Ces décisions sont souvent fondées sur des valeurs, des éthiques et des principes moraux, et nécessitent un jugement humain, qui ne peut pas être remplacé par une machine. Les IA peuvent certes aider les gouvernements dans certaines tâches, mais ne peuvent pas remplacer complètement les politiciens ou les décideurs humains.

De plus, la mise en place d’un système de gouvernement entièrement fondé sur l’IA soulève des questions éthiques importantes, notamment en ce qui concerne la responsabilité, la transparence et l’impartialité des décisions prises par l’IA. Les IA sont conçues par des êtres humains et reflètent fréquemment les biais et les préjugés de leurs créateurs, ce qui peut entraîner des décisions injustes ou discriminatoires.

Enfin, les IA ne peuvent pas non plus remplacer le rôle crucial que jouent les politiciens et les leaders dans la représentation des intérêts de leurs citoyens, la promotion du bien commun et la résolution des conflits. Les leaders doivent être capables de communiquer avec leur peuple, de négocier avec d’autres nations et d’incarner les valeurs et les aspirations de leur société.

En résumé, bien que les IA puissent être utiles dans certains domaines pour aider les gouvernements à prendre des décisions plus informées, une IA ne peut pas remplacer les politiciens et les leaders humains pour gouverner un pays. La gouvernance d’un pays exige une compréhension humaine des problèmes sociaux, économiques et politiques complexes, ainsi qu’un jugement moral et une responsabilité qui ne peuvent être remplacés par une machine.

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Bibliographie

  1. Byk, C. et Baumard, P. (2019). Intelligence artificielle : vers une domination programmée ? Éditions Odile Jacob.
  2. Massit-Folléa, F. (2019). Le numérique et les mutations de l’administration : Réflexions sur l’intelligence artificielle, les données et la confiance. Éditions Larcier.
  3. Caseau, Y. et Pêcheur, B. (2018). L’État intelligent : les technologies de l’information au service de la modernisation de l’État. Éditions FYP.
  4. Sauvé, J.-M. (2018). L’administration à l’heure du numérique. Éditions Dalloz.
  5. Bothorel, É., Cassard, A. et Netter, E. (2021). Intelligence artificielle et données publiques : enjeux et perspectives. Éditions Berger-Levrault.
  6. Géraud, P. et Netter, E. (2016). Les données ouvertes au service de l’administration électronique. Éditions Berger-Levrault.
  7. Braunschweig, B. et Garcia, C. (2019). L’Intelligence artificielle en action : au-delà des chatbots, l’impact de l’IA sur le business et la société. Éditions Eyrolles.
  8. Salles, M. et Marcou, T. (2018). La transformation numérique des organisations publiques. Éditions Berger-Levrault.
  9. Nevejans, N. (2019). L’IA au service de la société : comprendre et agir. Éditions Eyrolles.
  10. Marcotte, F. (2018). Intelligence artificielle, algorithmes et administration publique. Éditions Yvon Blais.
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